Une des plus fortes tentations que l’homme doive affronter, c’est celle de l’appétit. Il règne un rapport mystérieux et merveilleux entre le corps et l’esprit qui réagissent l’un sur l’autre. Le premier souci de la vie devrait être de conserver son corps en bonne condition pour que chaque organe de la machine vivante puisse jouer son rôle avec harmonie. Négliger le corps, c’est négliger l’esprit. Des corps maladifs et des esprits diminués ne peuvent glorifier Dieu. Se laisser aller à la gourmandise aux dépens de sa santé constitue un abus pernicieux. Ceux qui manquent de modération, dans le manger ou le boire, ou en quoi que ce soit, gaspillent leurs énergies physiques et diminuent leurs forces morales. La transgression des lois physiques se fera sentir un jour.
Le Sauveur du monde savait que céder à son appétit entraîne la débilité physique et émousse les organes de la perception de telle sorte que les choses sacrées et éternelles ne peuvent plus être discernées. Il savait que le monde se laisse aller à la gourmandise et que cette faiblesse pervertit les énergies morales. La race humaine s’est tellement abandonnée à la satisfaction de ses appétits que, pour briser la force de cette habitude, le Fils de Dieu fut obligé de jeûner pendant près de six semaines. Quel effort devra faire le chrétien afin de triompher, comme Jésus, sur ce point! La force de la tentation qui nous incite à satisfaire un appétit perverti ne peut s’évaluer qu’à l’inexprimable angoisse du Christ durant ce long jeûne dans le désert.
Le Sauveur savait que pour exécuter avec succès le plan du salut, il devait commencer l’œuvre de rédemption de l’homme au point même où la chute s’était produite. Adam pécha en s’abandonnant à son appétit. Afin de graver dans la conscience l’obligation absolue d’obéir à la loi de Dieu, le Christ commença l’œuvre de rédemption par une réforme des habitudes physiques de l’homme. Le déclin de la vertu et de la dégénérescence de la race doit être attribué surtout à la satisfaction d’un appétit perverti.
Nous avons tous la responsabilité, et particulièrement les prédicateurs qui enseignent la vérité contenue dans la Parole, de triompher sur ce point. L’utilité d’un prédicateur sera bien plus considérable s’il a le contrôle de ses appétits et de ses passions, et sa force mentale et morale sera plus grande s’il associe le travail manuel à l’exercice intellectuel. Avec des habitudes de stricte tempérance, et en faisant travailler à la fois son corps et son esprit, il se rendra capable d’assumer une plus grande somme de travail et il préservera la lucidité de son esprit. S’il persévère dans cette voie, sa pensée et ses paroles couleront de source, l’exercice de la piété aura plus d’énergie et l’impression qu’il fera sur ses auditeurs sera plus marquée.
Intempérance dans l’alimentation
L’intempérance dans l’alimentation, même lorsqu’il s’agit d’aliments de bonne qualité, aura des répercussions sur l’organisme et affaiblira les émotions les plus subtiles et les plus saintes. Une stricte tempérance dans le manger et le boire est essentielle au maintien de la santé et au bon exercice de toutes les fonctions du corps. Des habitudes de stricte tempérance, alliées à l’exercice musculaire aussi bien qu’à l’exercice intellectuel, préserveront à la fois les forces mentales et physiques et donneront une puissance d’endurance à ceux qui sont dans le ministère, aux rédacteurs et à tous les sédentaires. Nous qui prétendons prêcher la réforme sanitaire, nous mangeons trop. Se laisser aller à son appétit, voilà la plus grande cause de débilité physique et mentale, voilà ce qui est à la base de la faiblesse partout apparente.
L’intempérance commence à notre table lorsque nous faisons usage d’aliments malsains. Quand cet usage se prolonge quelque temps, les organes de la digestion s’affaiblissent et les aliments ne satisfont plus l’appétit. Des conditions défavorables à la santé sont alors créées et il en résulte un désir de prendre des aliments plus stimulants. Le thé, le café et la viande produisent un effet immédiat. Sous l’influence de ces poisons, le système nerveux est excité et, dans certains cas et pour un certain temps, l’intelligence paraît être stimulée et l’imagination devient plus vive. On peut conclure de ces résultats que le corps avait réellement besoin de ces aliments: aussi continue-t-on à en faire usage. Mais une réaction se produit toujours. Le système nerveux indûment excité emprunte sa puissance présente à ses réserves. Toute excitation temporelle du système nerveux est suivie d’une dépression correspondante. C’est dans la proportion où les stimulants auront donné à l’organisme une vigueur momentanée que se produira la dépression, une fois l’excitation tombée. L’appétit devient ainsi de plus en plus exigeant, au point que l’habitude est acquise et provoque un désir continuel de stimulants de plus en plus forts, tels que le tabac, le vin et les liqueurs. Plus on écoute son appétit, plus il devient impérieux et difficile à maîtriser; plus le système nerveux est débilité, moins aussi il tient en échec le goût pour les aliments excitants. La volonté est alors entièrement vaincue et il ne reste, semble-t-il, aucune force capable de lutter contre ces mauvais désirs.
La seule sauvegarde
La seule sauvegarde est de ne pas toucher, de ne pas goûter, de ne pas avoir à portée de la main le thé, le café, le vin, le tabac, l’opium et les boissons alcoolisées. La nécessité pour les hommes de notre génération d’appeler à leur aide la puissance de la volonté soutenue par la grâce de Dieu, afin de résister à la tentation et de ne pas se permettre le plus léger abandon à un appétit perverti—cette nécessité est deux fois plus grande maintenant qu’il y a quelques générations. Mais nous avons moins de maîtrise de nous que les gens de cette époque. Ceux qui ont satisfait leur goût pour ces stimulants ont transmis leurs appétits dépravés et leurs passions à leurs enfants: aussi faut-il une plus grande force morale pour résister à l’intempérance sous toutes ses formes. La seule sauvegarde consiste à s’établir fermement sur le terrain de la tempérance et à ne pas s’aventurer sur le chemin du danger.
Si le Christ a supporté un aussi long jeûne dans le désert, c’était pour nous enseigner la nécessité du renoncement à soi et de la tempérance. Cette œuvre devrait commencer à notre table et se poursuivre dans toutes les circonstances de la vie. Le Sauveur du monde est descendu du ciel pour aider l’homme dans sa faiblesse, afin que, par la puissance qu’il est venu lui apporter, celui-ci triomphe de son appétit et de ses passions, en étant victorieux sur tous les points.
Beaucoup de parents donnent de mauvaises habitudes à leurs enfants en leur faisant manger de la viande et boire du thé et du café. Celles-ci préparent le chemin qui conduira à désirer des stimulants plus forts encore, comme le tabac. L’usage de ce dernier amènera celui des liqueurs, et de telles habitudes affaibliront invariablement le système nerveux.
Si le sens moral des chrétiens s’éveillait au sujet de la tempérance en toutes choses, ils pourraient, par leur exemple et en commençant à leur table, venir en aide à ceux qui ont de la peine à se maîtriser et qui sont presque sans force pour résister aux exigences de leur appétit. Les habitudes que nous acquérons en cette vie décideront de notre destinée éternelle. Si nous nous en rendions compte, nous nous efforcerions d’être plus stricts dans notre façon de manger et de boire. Par notre exemple et notre empire sur nous-mêmes, nous pouvons être le moyen de sauver beaucoup d’âmes qui se dégradent par l’intempérance et vont jusqu’au crime et à la mort. Il est possible à nos sœurs, en particulier, de jouer un grand rôle dans le salut de leurs semblables en ne mettant sur leur table que des aliments sains et nourrissants. Elles peuvent employer leur temps à éduquer les goûts et les appétits de leurs enfants, en favorisant l’acquisition d’habitudes de tempérance en toutes choses, en encourageant le renoncement à soi et la bienveillance envers autrui.
Malgré l’exemple que le Christ nous a donné dans le désert de la tentation où il a montré son pouvoir de faire taire l’appétit et de le vaincre, il est bien des mères chrétiennes qui, par leur exemple et leurs manières d’éduquer leurs enfants, préparent ceux-ci à devenir gourmands et, plus tard, buveurs. On permet fréquemment aux enfants de manger ce qu’ils veulent et quand ils le veulent, sans tenir compte de la santé. Il en est beaucoup auxquels on apprend à être gourmands dès l’âge le plus tendre en ne refusant jamais de satisfaire leur appétit. Aussi deviennentils très tôt dyspeptiques. Leur intempérance dans le manger grandit en même temps qu’eux et devient plus forte à mesure qu’ils se fortifient aussi. Leur vigueur mentale et physique est ainsi sacrifiée à cause de l’indulgence des parents. Ils prennent l’habitude d’aimer certains aliments dont ils ne peuvent attendre que du mal. Le système nerveux est trop souvent mis à contribution et l’organisme tout entier s’affaiblit.
Bienfaits de l’exercice physique
Les prédicateurs, les professeurs et les étudiants ne développent pas leur intelligence comme ils le pourraient s’ils se livraient à l’exercice physique en plein air. Ils négligent ce devoir, qui est essentiel au maintien de la santé. Ils sont toujours penchés sur leurs livres et se nourrissent comme s’ils travaillaient au dehors. Une telle habitude les fait engraisser parce que l’organisme est encombré. D’autres s’affaiblissent parce que leurs forces vitales s’épuisent à se débarrasser de l’excès de nourriture. Le foie est surmené et incapable d’éliminer les impuretés du sang. La maladie survient bientôt. Si l’exercice physique était associé à l’exercice intellectuel, la circulation du sang en serait accélérée, le cœur remplirait plus aisément son office, les éléments toxiques seraient éliminés, et une vie nouvelle ferait sentir ses bienfaits dans chaque partie du corps.
Quand l’esprit des prédicateurs de l’Evangile, des professeurs de nos écoles et des étudiants est sans cesse en action par l’étude, les nerfs qui commandent les émotions* sont sollicités alors que ceux qui commandent les mouvements sont inactifs. Comme ce sont les organes de l’intelligence qui sont toujours mis à contribution, ils sont surmenés et affaiblis, tandis que les muscles perdent leur vigueur faute d’exercice. On n’est pas poussé à faire travailler ses muscles en se livrant à un effort physique, parce que l’exercice semble ennuyeux.
Qui doit donner l’exemple?
Les ministres du Christ, qui se prétendent ses représentants sur la terre, devraient suivre son exemple et plus que personne acquérir des habitudes de la plus stricte tempérance. Qu’ils vivent la vie du Christ qui a donné à son peuple l’exemple du renoncement, du sacrifice de soi et d’une active bienfaisance. Le Sauveur a vaincu l’appétit à notre profit: c’est pourquoi, en marchant sur ses traces, le prédicateur donnera aux autres un exemple digne d’être imité. Ceux qui n’éprouveront pas le besoin de s’engager dans cette lutte contre l’appétit ne remporteront pas les précieuses victoires qu’ils auraient pu obtenir. Ils deviendront les esclaves de la convoitise qui fait déborder la coupe d’iniquité ici-bas.
Les hommes qui proclament le dernier message d’avertissement au monde, message décisif pour la destinée des âmes, devraient mettre en pratique les vérités qu’ils prêchent aux autres. Il leur faut montrer l’exemple à tous dans le manger et le boire ainsi que dans la pureté de leur conduite. La gourmandise, la satisfaction des passions les plus basses et des péchés hideux sont cachées sous le vêtement de la sainteté par beaucoup de ceux qui se prétendent représentants du Christ sur la terre. Ce sont des hommes qui ont beaucoup de talents naturels, mais qui n’accomplissent pas la moitié de ce qu’ils pourraient faire s’ils étaient tempérants. La satisfaction de l’appétit et des passions obnubile l’esprit, diminue les forces physiques comme elle affaiblit la vigueur morale. Les pensées ne sont pas claires, les paroles manquent de puissance. N’étant pas vivifiées par l’Esprit de Dieu, elles ne peuvent atteindre le cœur des auditeurs.
Puisque nos premiers parents ont dû quitter le jardin d’Eden pour avoir cédé indûment à leur appétit, notre seul espoir d’y rentrer est de résister fermement à la gourmandise et à la passion. La sobriété dans la nourriture et la maîtrise des passions préserveront l’intelligence, produiront la vigueur mentale et morale, et rendront l’homme capable de se soumettre entièrement au contrôle des plus hautes facultés et de discerner entre le bien et le mal, le sacré et le profane. Tous ceux qui ont réellement compris le sacrifice que le Christ a consenti en quittant le ciel afin de montrer à l’homme comment résister à la tentation, tous ceux-là renonceront volontairement à eux-mêmes et se décideront à prendre leur part des souffrances du Sauveur.
Une conscience éclairée
La crainte de Dieu est le commencement de la sagesse. Ceux qui ont vaincu à l’exemple du Christ devront se tenir constamment sur leurs gardes pour ne pas céder aux tentations de Satan. Il faut tenir en bride l’appétit et les passions grâce à une conscience éclairée, afin que l’intelligence soit lucide, discerne clairement les œuvres et les pièges de Satan, et ne les confonde pas avec les effets de la providence divine. Beaucoup de gens désirent la récompense finale et la victoire, mais ils ne sont pas disposés à endurer les fatigues et les privations, ainsi qu’à se renoncer comme l’a fait le Sauveur. C’est par l’obéissance seule et un effort continuel que nous pourrons vaincre comme le Christ a vaincu.
La puissance de l’appétit causera la perte de milliers d’hommes alors que, s’ils avaient eu la victoire à cet égard, ils auraient eu la force morale de triompher de toutes les autres tentations de Satan. Mais ceux qui sont esclaves de leur appétit ne pourront atteindre à la perfection du caractère. La transgression permanente de la loi de Dieu, depuis six mille ans, a produit la maladie, la souffrance et la mort. Alors que nous approchons de la fin des temps, la tentation de Satan à propos de l’appétit sera toujours plus forte et plus difficile à vaincre.
La tempérance doit commencer dans la famille, à table. Les mères ont à jouer un rôle important afin de donner au monde, grâce à une bonne discipline et à une saine éducation, des enfants capables d’occuper n’importe quelle position et aussi de remplir joyeusement leurs devoirs domestiques.
La tâche de la mère est importante et sacrée. Celle-ci devrait inculquer à ses enfants dès le berceau des habitudes de renoncement et de maîtrise de soi. Si elle occupe son temps aux folies de ce siècle de dégénérescence, si elle perd des heures précieuses à s’occuper de sa toilette et à recevoir ses amies, alors elle ne pourra donner à ses enfants l’éducation dont ils ont un urgent besoin afin d’acquérir de bons caractères. Une mère chrétienne ne devrait pas passer tout son temps à la parure extérieure, mais faire l’impossible pour que ses enfants aient une saine constitution et de bonnes mœurs.
Bien des mères déplorent l’intempérance générale et ne voient pas quelle en est la vraie cause. Elles préparent journellement une grande variété de mets et une nourriture fortement épicée qui sollicitent l’appétit et encouragent à trop manger. Les tables du peuple américain sont généralement servies de manière à faire des ivrognes. Pour beaucoup de personnes, la satisfaction de l’appétit est la seule qui compte. Celui qui se permet de manger trop souvent, et une nourriture de mauvaise qualité, affaiblit sa résistance aux exigences de l’appétit et de la passion sur d’autres objets, dans la proportion où il s’est laissé aller à de mauvaise habitudes alimentaires. Les mères devraient ressentir leur obligation, en face de Dieu et du monde, de donner à la société des enfants dont elles auront formé sainement le caractère. Des hommes et des femmes qui se lancent dans la vie avec des principes solides pourront se préserver de la souillure au milieu même des vices d’un siècle corrompu.—1875, Testimonies for the Church 3:562, 563.
Puisque la santé de l’esprit dépend de la bonne condition des forces vitales, combien on devrait être attentif à n’employer ni stimulants, ni narcotiques!
Le tabac est un poison lent et insidieux et ses effets sont plus difficiles à dissiper que ceux de l’alcool. Quelle force celui qui y est adonné ne doit-il pas mettre en jeu pour arrêter les progrès de son intempérance! Il faut une révolution dans notre monde à ce sujet afin que la hache soit mise à la racine de l’arbre. Soyons plus précis: le thé et le café font naître le besoin de stimulants plus forts, comme le tabac et l’alcool. Allons plus loin encore: que sert-on journellement sur la table des chrétiens? Y pratique-t-on la tempérance en toutes choses? Les réformes essentielles à la santé et au bonheur ont-elles été entreprises?
Tout vrai chrétien aura le contrôle de son appétit et de ses passions. S’il n’est pas libéré de cet esclavage, il ne peut être un fidèle serviteur du Christ. La soumission à ses désirs rendra la vérité sans effet sur le cœur. Il est impossible à l’esprit et à la puissance de la vérité de sanctifier un homme, âme, corps et esprit, quand cet homme est dominé par son appétit et ses passions.—1875, Testimonies for the Church 3:569, 570.
Il faut garder le contrôle de ses sens, si l’on ne veut pas que Satan ait la victoire, car ils sont les avenues qui conduisent à notre âme.—1875, Testimonies for the Church 3:507.
Nous prétendons être un peuple de réformateurs, de porte-flambeaux, de fidèles sentinelles de Dieu, qui surveillent toutes les avenues par lesquelles Satan pourrait se glisser avec ses tentations pour pervertir l’appétit. Il faut que notre exemple et notre influence pèsent dans la balance du côté de la réforme. Nous devons nous abstenir de toute pratique qui émousse la conscience et favorise la tentation. N’ouvrons aucune porte qui donne à Satan accès à l’esprit d’un homme formé à l’image de Dieu. Si tous étaient vigilants et fidèles, on n’encouragerait pas l’usage du vin et du cidre, ce que l’on fait en réalité en se permettant de consommer modérément ces boissons qu’on dit inoffensives. La route qui conduit à l’ivrognerie serait ainsi barrée. Ce qu’il faut dans chaque église, c’est une ferme décision de ne pas toucher, de ne pas goûter ces choses. Alors, la réforme sur le plan de la tempérance se fera solidement et d’une manière permanente.—1875, Testimonies for the Church 5:380.